La distance raisonnable, critère de légalité du passe sanitaire ?

La distance raisonnable, critère de légalité du passe sanitaire ?

Quel moyen d’accès – direct ou pas – aux produits de première nécessité dans les centres commerciaux pour les personnes ne possédant pas de passe sanitaire ? La question qui divise les tribunaux (v. Dalloz actualité, 6 sept. 2021) a fini par remonter au Palais-Royal. La solution du juge des référés ne va cependant pas faciliter le travail des préfets.

Des particuliers avaient saisi le juge des référés du tribunal administratif de Nice pour qu’il suspende l’obligation préfectorale imposant le passe sanitaire à l’entrée de six centres commerciaux des Alpes-Maritimes. Ils ont fait appel devant le Conseil d’État de l’ordonnance rejetant leur demande. Le gouvernement ayant revu sa position sur le passe sanitaire, celui-ci n’est plus requis dans les centres commerciaux des départements où le taux d’incidence est inférieur à 200/100 000 et en décroissance continue depuis au moins sept jours. De nombreux recours sont devenus sans objet, pas en l’espèce.

Un public mixte

Le juge des référés s’est interrogé sur la « garantie d’accès » des personnes aux biens et services de première nécessité ainsi que, le cas échéant, aux moyens de transport, figurant au point II, 7°, de l’article 47-1 du décret n° 2021-699 du 1er juin 2021 modifié.

Face à un public mixte, composé de ceux qui possèdent un passe sanitaire et ceux qui n’en possèdent pas, ces dipositions, précise le Conseil d’État, « n’imposent pas d’assurer cette garantie au regard de ceux se trouvant dans l’enceinte des grands magasins et centres commerciaux dans lesquels est exigé le passe sanitaire ». Pour autant, les préfets devront s’assurer que les personnes des centres commerciaux concernés ont la possibilité d’accéder à des biens et services de première nécessité, en particulier alimentaires et de santé, « dans des magasins ou établissements situés à une distance raisonnable de ces centres, appréciée au regard de la densité urbaine et des moyens de transport disponibles ». La difficulté se corse pour les préfets puisqu’il leur appartient, de permettre à toutes les personnes, y compris celles non détentrices d’un passe sanitaire, « l’accès aux lieux de soins situés dans l’enceinte de ces centres commerciaux, le cas échéant, lorsqu’un accès différencié à ces lieux ne peut être aménagé, sur présentation d’un justificatif de rendez-vous. » Et lorsqu’il existe un accès direct à des moyens de transport depuis un centre commercial dans lequel est exigé le passe sanitaire, les préfets devront s’assurer « que les personnes non détentrices de ce passe peuvent accéder à ces mêmes moyens de transport par des accès pour lesquels le passe n’est pas requis, situés à proximité immédiate de ce centre ».

Pas de méconnaissance du principe d’égalité

Le juge des référés considère que la méconnaissance du principe d’égalité ne révèle pas une atteinte à une liberté fondamentale. En tout état de cause, l’obligation de présentation d’un passe sanitaire pour accéder à certains lieux, dès lors que ce dernier n’est pas limité au seul certificat de vaccination, « ne crée aucune discrimination entre les personnes vaccinées et non vaccinées qui serait contraire au principe d’égalité et au règlement (UE) 2021/953 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2021 relatif à un cadre pour la délivrance et l’acceptation de certificats covid-19 interopérables de vaccination, de test et de rétablissement afin de faciliter la libre circulation pendant la pandémie de covid-19. »

Précisons qu’une première audience s’est tenue au Conseil d’Etat la semaine dernière s’agissant du passe sanitaire dans les centres commerciaux lyonnais. A l’issue de celle-ci, les différentes sociétés requérantes se sont purement et simplement désistées (CE ord., 10 sept. 2021, n° 456263, Société Centre Commercial Lyon La Part-Dieu et autres ; CE ord., 10 sept. 2021, n° 456213, Société Dolulle et autres).

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Maitre Didier ADJEDJ   SELASU AD CONSEIL AVOCAT   34, COURS ARISTIDE BRIAND    84100 ORANGE

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