CE 27 mai 2016, req. n° 396853
Dans un avis rendu à la demande du tribunal administratif de Montreuil, le Conseil d'État interprète les nouvelles règles de versement de l'astreinte prévue par l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation en cas d'absence de relogement du bénéficiaire du droit au logement opposable (DALO).
La loi de finances pour 2016 a prévu que « le jugement prononçant l'astreinte mentionne que les sommes doivent être versées jusqu'au jugement de liquidation définitive», ce versement étant effectué deux fois par an. Le tribunal administratif de Montreuil souhaitait savoir si ces dispositions impliquaient, lorsqu'une astreinte a été prononcée par le juge antérieurement au 1er janvier 2016, que des liquidations intermédiaires continuent à être prononcées par le juge.
Le Conseil d'État répond « que le législateur a entendu supprimer les liquidations provisoires de l'astreinte par le juge, auxquelles l'obligation pour l'État de verser le montant des astreintes au fonds d'accompagnement vers et dans le logement était auparavant subordonnée. Il incombe désormais au représentant de l'État dans le département, tant que l'injonction n'est pas exécutée, de verser spontanément l'astreinte au fonds dès qu'elle est due pour une période de six mois. Lorsque le représentant de l'État estime avoir exécuté l'injonction, il lui appartient de demander au juge de constater cette exécution et de procéder en conséquence à une liquidation définitive de l'astreinte ».
La haute juridiction ajoute que, compte tenu « de l'équilibre d'ensemble de ce dispositif, de ses modalités et de sa portée, notamment du fait que les astreintes prononcées sont dues par l'État et versées au fonds national d'accompagnement vers et dans le logement, rattaché à la Caisse de garantie du logement locatif social qui est un établissement public national à caractère administratif, et en l'absence de dispositions expresses régissant l'application dans le temps des dispositions de la loi du 29 décembre 2015, ces dispositions s'appliquent de plein droit aux astreintes prononcées par des jugements antérieurs au 1er janvier 2016, date d'entrée en vigueur de la loi. La circonstance que ces jugements ne mentionnent pas que les sommes doivent être versées jusqu'au jugement de liquidation définitive est sans incidence à cet égard ».
Par conséquent, lorsqu'une astreinte prononcée antérieurement au 1er janvier 2016 est due pour une période d'au moins six mois, le préfet doit spontanément en verser le montant au fonds national d'accompagnement vers et dans le logement. « Il en va ainsi y compris pour les sommes dues au titre de périodes antérieures au 1er janvier 2016 », précise le Conseil d'État.
Par ailleurs, celui-ci s'est prononcé, le même jour, sur une autre demande d'avis du tribunal administratif de Montreuil concernant le DALO.
Le tribunal s'interrogeait sur la compatibilité avec l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme du mécanisme de recours du DALO. Le Conseil d'État affirme que la voie de recours, ouverte par les dispositions de l'article L. 441-2-3-1 du code de la construction et de l'habitation « devant un juge doté d'un pouvoir d'injonction et d'astreinte de nature à surmonter les éventuels obstacles à l'exécution de ses décisions, présente un caractère effectif, au regard des exigences découlant de l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il en va ainsi, alors même que l'astreinte éventuellement prononcée sur le fondement de l'article précité, compte tenu des critères qu'il énonce, est versée par l'État, non au requérant, mais au fonds d'accompagnement dans et vers le logement, créé par l'article L. 300-2 du code de la construction et de l'habitation et institué, depuis 2011, au sein d'un établissement public national autonome, la Caisse de garantie du logement locatif social ».
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